lundi 8 septembre 2014

Première phrase, première page... Florilège des travaux du 3 septembre

ETRANGES OUVERTURES  - Morceaux choisis des travaux réalisés sur table le 3 septembre 2014

Parce que l’écriture n’appartient pas qu’aux écrivains, ou parce que nous sommes tous aussi des écrivains, chacun à notre mesure et pour peu qu’on y prenne goût, des travaux d’écriture seront mis en ligne régulièrement sur ce blog.
Comment commencer une histoire ?
Première question affrontée en ce début d’année, à travers une série de premières phrases d’incipits romanesques dont je n’ai pas souhaité livrer titres et auteurs. Vous avez dû choisir l’une de ces phrases et inventer le début d’une histoire, dans le registre de votre choix.
Voici quelques incipits qui m’ont semblé percutants, touchants, intrigants…
Rien ne vous empêche maintenant d’aller lire les solutions romanesques inventées par les « propriétaires » de ces premières phrases, histoire de vérifier l’incroyable richesse des « possibles narratifs » qui s’offrent à l’écriture…


·         « ça a débuté comme ça »
·         « Mon premier acte en entrant dans ce monde fut de tuer ma mère »
·         « Nous voici encore seuls »
·         « Personne ne me connaissait à Buckton. »
·         « Un jour, j’étais âgée déjà, dans le hall d’un lieu public, un homme est venu vers moi »
·         « Je vais encourir bien des reproches »
·         « Le silence s’est fait dans Moscou »
·         « Longtemps je me suis couché de bonne heure »
·         « Aujourd’hui maman est morte. » 
·         « C’est le moment de croire que j’entends des pas dans le corridor »
·         « C’était l’été où l’homme a pour la première fois posé le pied sur la lune »
·         « Il entra dans ma vie en février 1932 pour n’en jamais sortir »
·         « J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. »
·         « La première fois qu’Aurélien vit Bérénice, il la trouva franchement laide »
·         « Comment s’étaient-ils rencontrés ? Par hasard, comme tout le monde.
·         « Bordel de merde de vérole du cul ! balbutia Lituma en sentant qu’il allait vomir »
·         « Pour Noël, j’avais envie d’un rat, car j’espérais des mots déclencheurs pour un poème traitant de l’éducation du genre humain »
·         « On oublie volontiers qu’en moyenne nous mourons sept fois plus lentement que nos chiens »
·         « Je ne suis rien »
·         « Le téléphone sonna et elle sut qu’ils allaient la tuer »



« C’est le moment de croire que j’entends des pas dans le corridor. Autrement ma vie s’arrête, ici, dans cette salle sombre et lugubre où une odeur nauséabonde me tord la gorge. Je ne discerne pas grand-chose, mis à part le ciel noir percé d’étoiles à travers l’unique fenêtre. J’ignore où je suis. Peut-être m’ont –ils emmenée pour en finir. Mes mains sont attachées derrière mon dos, elles sont glacées malgré la chaleur étouffante de la pièce. J’ai peur.
Si seulement ma mère m’avait écoutée…
Je ne serais pas ici, sanglotant et sursautant au moindre grincement. Je ne serais pas en train d’attendre misérablement la mort. Je tourne furtivement la tête vers la fenêtre, un oiseau vient de se poser, il m’observe. J’en fais autant, jusqu’à ce qu’il se mette à frapper contre le verre. Que fait-il ? Le bruit risque d’alerter mes agresseurs. Je ne veux pas qu’ils me frappent, pas encore. Soudain il s’arrête puis me regarde de nouveau. Les lueurs de la nuit se reflètent dans ses yeux. Je souris à cette beauté passagère. Cela fait bien longtemps que je n’ai pas vu la lumière, la beauté du monde, la nature, les sourires… J’ai envie de vomir, d’extraire tout le mal en moi qui me ronge depuis plus de trois jours. Tout à coup j’aperçois la lumière du corridor sous la porte verrouillée.
Je sens que c’est la fin. La mort est là, dressée sous mes yeux transparents et pourtant… »
                                                                                                                                                   Clara P


« Je ne suis rien et je n’ai jamais été grand-chose.
On me l’a souvent répété au cours de ma vie et je me suis vraiment faite à cette idée. Comme quoi on ne pourra pas faire entrer quelque chose dans mon crâne. Qu’il s’agisse de recettes, de formules ou même de chansons, je suis bien incapable de retenir quoi que ce soit.
Je suis une bonne-à-rien. Une moins-que-rien. Une misère. Une cendre au milieu d’un champ.
Je suis la pomme pourrie dans le panier. Celle que personne ne veut manger.
Malgré tous les reproches et toutes les brimades dont je suis victime, je garde l’espoir incertain que mon cœur, mes mains et ma rate valent bien une pièce ou deux.
Aujourd’hui tout s’achète. Même les sentiments. Pourtant personne ne veut jamais de moi comme amie, comme confidente. C’est pas faute d’avoir essayé de me faire aimer. Ma mère m’a abandonnée. Mon père a été assassiné. Je dois être née sous une mauvaise étoile.
Il y a malgré tout cette impression que quelque chose est en train de changer. Vous savez, cette petite boule au creux du ventre qui nous cisaille les tissus internes à grands coups de rasoir. Et bien, cette boule est constamment en moi. Elle se déplace. Quand elle n’est pas dans ma tête elle est dans mes bras, puis sous mes oreilles et souvent dans mes cuisses.
Ma vie va changer. »
                                                                                                                                                  Laurie K


« Ca a débuté comme ça. Pour la première fois de mon existence je n’avais plus peur de ce mot. Je pouvais le crier, même à elle. Pour la première fois je l’ai regardé droit dans les yeux et j’ai prononcé ce tout petit mot qui était pour moi un grand pas. « Non ! »
Je pense que je fus le plus surpris, mais je persistais, je la fixais, sans vergogne, le visage inexpressif.
Contrairement à moi son visage commençait à montrer de la colère, non, pas de la colère, du mépris, ce voile qui apparaissait si souvent sur son visage en ma présence. Mais cela ne m’importait plus, j’avais dépassé son mépris, oui, j’avais réussi.
C’est alors qu’elle s’avança et me gifla. La gifle fut sonore. Et ce coup me fit mal. Je ne pus empêcher une larme de couler le long de ma joue, je savais que cette seule larme la satisferait. Effectivement, lorsque je levai la tête, elle avait ce rire cruel sur les lèvres. Mais elle savait qu’elle n’avait pas gagné, elle le savait car malgré son sourire effrayant, au fond de ses yeux, je lus un sentiment nouveau, un sentiment qu’elle n’avait jamais montré auparavant : de la peur. Elle savait que désormais tout changerait. » 
                                                                                                                                                   Aude C



« J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. Je me droguais déjà depuis sept ans, mon avenir était tracé. J’avais tout testé, du shit à l’héroïne, en passant par l’ecstasy, les médocs, le crack, le speed, les torpilles et le LSD. En matière de drogue, j’étais calée. Du moins j’en étais persuadée. Le problème quand on a commencé, c’est qu’il n’y a plus de vie possible sans drogue. Chaque jour, trouver de quoi payer sa dose quotidienne et si on a un peu de chance, celle du lendemain. Comment ? Trois alternatives : le tapin, le vol, et si t’es un peu jolie, tu peux toujours te faire entretenir par deux ou trois vieux friqués en manque d’affection. Mais peu importe la voie que tu choisis, au bout du chemin, y’a rien d’autre qu’un putain d’hiver. Dans ce monde qui me fascinait tant, dans ce monde que j’imagine et que j’invente, une chose est bien réelle : la douleur. Parce que quand on est accro, il ne reste que ça, la souffrance et la dépendance.
Avec la drogue s’envolent l’espoir, l’amour, la compassion et toutes ces choses qui nous différencient des animaux, pour ne laisser en toi que la merde de ce monde. On croit naïvement être maître de soi-même, en se disant à chaque dose prise que c’est la dernière…jusqu’à la prochaine.
J’avais vingt ans quand je suis morte.
Etait-ce une fois de trop ? Etait-ce prémédité ? Quelle importance, une overdose pour une droguée, c’est logique après tout.
Voici l’histoire de ma mort. »
                                                                                                                                                     Lola C






« C’était l’été où l’homme a pour la première fois posé le pied sur la lune. Pour nous, citoyens de Karenta, c’était une révolution, le début d’une nouvelle ère où tout semblait réalisable.
Imaginez, un homme était allé au-delà des frontières de ce monde, à des milliers de kilomètres pour fouler le sol de cet astre. Je me souviens encore, regardant à travers la fenêtre de ma vieille voiture, l’éclat lumineux de la lune. Au fond de moi, une certaine jalousie faisait son apparition.
Mon nom est Steven Artel, j’avais 12 ans à l’époque. J’étais ce genre de garçon bourré d’ambition, mais qui à mon avis finirait dans la ferme de mon père, à couper du bois et élever des vaches. Je voyais à travers l’exploit de cet astronaute une ouverture vers l’inconnu, une possibilité de réaliser mon rêve le plus grand, explorer notre univers et découvrir la multitude de secrets qui le composent.
Passionné d’astronomie, je passais des heures devant mon télescope, chaque soir après le repas, à admirer la beauté des étoiles. Comment de si petites choses pouvaient-elles être si intrigantes par leur beauté et leur éclat ?
C’était devenu une obsession pour moi, à tel point que je me suis demandé s’il était possible de tomber amoureux des étoiles.
Aujourd’hui nous sommes le 4 octobre 2014, je me prépare pour un voyage, le voyage qui changera sans doute la vision de notre humanité, un voyage qui remettra en cause les théories des plus éminents scientifiques de notre époque sur les fondements de l’univers.
Voulez-vous savoir comment j’en suis arrivé là, et quelle est cette mystérieuse destination ?
Alors laissez-moi tout d’abord vous raconter mon histoire. »
                                                                                                                                             Aurélien G



« -Bordel de merde de vérole de cul ! balbutia Lituma en sentant qu’il allait vomir. En effet, 5 heures plus tôt il était chez lui et se préparait pour la soirée la plus démentielle de sa vie. Tous ses amis et plus de la moitié des élèves de son lycée allaient se réunir pour fêter leur diplôme.
Après s’être coiffé, après avoir enfilé sa plus belle tenue – un costume trois pièces – il rejoignit ses amis dans la salle des fêtes réservée pour l’occasion.
Quand ils arrivèrent, il était 22 heures et la soirée avait déjà commencé. Avant qu’ils entrent ils aperçurent un groupe de jeunes ivres morts, ce qui leur donna envie de les rejoindre car ils rigolaient sans cesse.  Ils entrèrent et Lituma salua ses amis, puis ils se dirigèrent vers le bar, des hommes étaient affalés sur le comptoir, vidant verre sur verre.
Lituma prit un verre, puis un autre, puis il s’aperçut que tout devenait flou autour de lui. Un jeune s’approcha alors, lui tendit un sachet rempli de poudre blanche et lui dit que ce produit lui permettrait de boire sans s’arrêter. Naïf, Lituma respira et il sentit une sensation de confiance. Deux heures après cette sensation de confiance se transforma en nausée, une nausée qui se fit de plus en plus forte.
Il se dirigea vers les toilettes et poussa un juron : « Bordel de merde de vérole de cul ! »  Il savait désormais qu’il allait vomir. »
                                                                                                                                             Clément C




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